De nouvelles maladies vectorielles* émergentes : dermatose nodulaire contagieuse bovine, clavelée du mouton, et variole caprine …

Ces dernières années ont été marquées par l’émergence et la recrudescence de maladies vectorielles* en Europe. Le contexte de changement climatique et l’intensification des échanges participent à l’amplification de ces phénomènes posant une problématique majeure en santé animale mais aussi en santé humaine. La France n’est pas exempte de ces phénomènes émergents comme en témoigne la détection récente de cas de dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC) en Savoie

* Maladie infectieuse qui ne se transmet pas par contact direct mais via l’intermédiaire d’un vecteur (arthropode hématophage)

La DNC fait partie, comme ses cousines, la clavelée du mouton et la variole caprine, du groupe des varioles des ruminants. Elles sont causées par différents virus de la famille des Poxvirus. Ces virus se caractérisent par une spécificité plus ou moins stricte de leur hôte. La résistance de ses virus est très grande dans le milieu extérieur. Par exemple, dans le cas de la DNC, il peut résister jusqu’à 80 jours à 20 °C. Ils sont toutefois très sensibles aux rayons ultra-violets et aux solvants des lipides. Ces maladies ne sont pas transmissibles à l’Homme. Catégorisées ADE dans le cadre de la Loi de Santé Animale, ce sont des pathologies soumises à éradication immédiate (impliquant l’euthanasie des bovins du foyer).

La dermatose nodulaire contagieuse bovine 

Originaire de l’Afrique sub-saharienne, depuis 2012, elle s’étend vers le Moyen-Orient, le Sud-Est de l’Europe et l’Asie Centrale. Elle a été détectée la première fois en novembre 2013 en Turquie puis s’est propagée en Grèce en août 2015, et dans les Balkans en 2016. Selon le CIRAD, au pic de l’épidémie 1 203 cas ont été déclarés. La mise en place de politiques d’abattage partiel ou total, de désinsectisation, de restrictions aux mouvements et surtout de vaccination ont permis la quasi-extinction de la DNC en 2017 (Cauchard et al, 2017) mais elle était toujours présente en Afrique du Nord. En juin 2025, un premier foyer a été déclaré en Sardaigne suivi de trois autres dans la même commune. Un deuxième foyer a été déclaré au Nord de l’Italie, quatre jours après en lien épidémiologique avec le foyer de Sardaigne. L’origine de l’épidémie pourrait s’expliquer par une vague d’insectes hématophages emportés par le vent, comme lors de la MHE. Le 29/06/2025, un premier foyer s’est déclaré en Savoie. Au 07/07/2025, quatre foyers ont été recensés tous dans la même commune.

Afin de limiter la propagation de la maladie, une surveillance est nécessaire. Les symptômes apparaissent entre 4 et 14 jours voire un mois après la contamination. Généralement, la maladie commence par une fièvre pouvant atteindre 41°C et persister durant deux semaines. Elle s’accompagne d’abattement, d’anorexie, de larmoiement, de jetage, d’hypertrophie des ganglions et de chute brutale de la production laitière. Apparaissent ensuite des signes cutanés : hérissement des poils puis apparition de nodules durs arrondis et indolores sur la tête, le cou, les membres et la mamelle. Des nodules peuvent être observés sur les muqueuses (bouche, nez, yeux, vulve, prépuce) et la trachée. Sur la bouche et la trachée, les nodules s’érodent, engendrent de la douleur et empêchent l’animal de s’alimenter. Lors d’atteinte de la mamelle, on observe un œdème prononcé et l’apparition de petits nodules puis d’ulcères, tant sur les trayons que sur la paroi de la mamelle elle-même. Des œdèmes sous-cutanés très étendus sont fréquents sur les lombes, le fanon et les membres, faisant parfois éclater la peau. Les nodules finissent par se dessécher et se détacher du tissu sous-jacent en deux à cinq semaines, laissant une plaie en cône à l’emporte-pièce.

La transmission se fait par des vecteurs notamment des stomoxes (mouches d’étables) mais sans doute aussi des vecteurs plus légers comme les culicoïdes. Les principales sources du virus sont les nodules, les squames et croûtes, le jetage la salive, la semence et le lait.

 La clavelée du mouton et la variole caprine

Ces deux maladies touchent les ovins et les caprins mais il est rare que la même souche contamine les deux espèces.

Comme pour la DNC, ces deux pathologies sont originaires de l’Afrique du Nord. Elles sont décrites dans la littérature de manière constante avec des vagues plus ou moins importantes au Maroc, en Algérie, Tunisie ou encore Mauritanie. Dans ces pays, la vaccination est pratiquée. La clavelée s’est propagée en Turquie en 2006 (environ 311 foyers par an). Les derniers foyers en Europe hors Turquie avaient été déclarés par la Grèce en 2018 dans des îles situées à proximité de la Turquie et par l’Espagne en 2022. Depuis septembre 2024, une recrudescence de l’épidémie en Grèce et une propagation en Bulgarie (19 foyers détectés) et Roumanie (6 foyers détectés) ont été observées. Les derniers foyers datent de fin juin 2025.

Les signes cliniques sont assez semblables à la DNC. Ils apparaissent entre 1 et 3 semaines après la contamination. Comme pour la DNC, la première phase se traduit par une hyperthermie, un abattement, un jetage, des larmoiements… Puis dans un second temps, des lésions de forme vésiculeuse apparaissent. Elles se retrouvent essentiellement sur les zones glabres (oreilles, face …) et les muqueuses.  Les macules (taches planes rougeâtres) se transforment en papules (bouton), plus rarement en vésicules (avec une goutte de liquide à l’intérieur), qui évoluent pour laisser place à des lésions surinfectées qui finissent en croutes en forme de clous (d’où le nom de clavelée). Les animaux survivants gardent le plus souvent des cicatrices indélébiles. Il existe deux formes : une forme suraiguë, plus rare, avec des mortalités brutales et une forme fruste plus silencieuse avec quelques lésions sur les oreilles et la queue, très fréquente chez la variole caprine. Le taux d’animaux atteints (morbidité) est proche de 100%. La mortalité varie de 50 % à 80% sur les animaux les plus fragiles notamment chez les jeunes animaux.

Contrairement à la DNC, il existe plusieurs modes de contamination :

  • Une transmission directe via le contact avec des individus infectés par le biais des lésions ou par les sécrétions respiratoires des individus contaminés.
  • Une transmission indirecte par des mouches.

Suspicion et lutte contre ces maladies

En cas de suspicion, il est nécessaire de contacter son vétérinaire afin qu’il confirme ou non l’hypothèse, réalise les prélèvements et déclare la suspicion auprès de la DDecPP. En cas de résultat positif, l’élevage est déclaré foyer et placé sous arrêté préfectoral de déclaration de l’infection (APDI). Le cheptel est abattu, un protocole de nettoyage/désinfection suit. Des zones de restriction de mouvements et de surveillance (rayon de 20km et de 50km) sont mises en place. A ce jour, des vaccins existent mais ne disposent pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM) au sein de l’Union Européenne. La Commission européenne peut décider d’une autorisation d’utilisation temporaire (ATU) sur demande des états membres L’Italie vient de le faire pour la DNC. Il est très probable que la France s’engage aussi dans la vaccination.

Que faire à mon échelle ?

Les mesures de biosécurité restent essentielles : il est nécessaire de limiter l’introduction d’animaux en provenance des zones à risques. Il est toujours important de surveiller quotidiennement ses animaux afin de réagir le plus rapidement possible pour freiner la propagation de la maladie. Nous vous encourageons à consulter les différentes fiches d’information diffusées par GDS France.

Pour plus de renseignements, n’hésitez pas à consulter votre GDS et vos vétérinaires

Malgré l’actualité sanitaire, il ne faut pas pour autant oublier la FCO 8 et MHE, toutes deux déjà présentes en Poitou-Charentes ni la FCO 3 déjà signalée ponctuellement. L’Etat a annoncé la mise à disposition de 7 millions de doses de vaccins contre la FCO 8 pour les éleveurs ovins à compter du 31/07/2025 (2 injections). Concernant la FCO 3, la FCO 8 des bovins et la MHE, les vaccins sont disponibles sur le marché privé. La disponibilité des vaccins sur le territoire laisse penser qu’aucun dispositif d’indemnisation ne sera ouvert en 2025, il est donc important de vacciner dès que possible pour prévenir les éventuelles pertes de cette année.

Publié le 10/07/2025