Avortements chez les ruminants

Les avortements comptent parmi les troubles de santé les plus fréquents et les plus pénalisants économiquement dans les exploitations.
Longtemps, a été « considéré comme avortement (….) l’expulsion d’un fœtus ou d’un animal mort-né ou succombant dans les 12h suivant la naissance, à l’exclusion des avortements d’origine manifestement accidentelle ».

Une déclaration obligatoire …

Historiquement motivée par la lutte contre la brucellose dont c’est le signe majeur, la déclaration de l’avortement chez les bovins ainsi que de tout épisode abortif chez les petits ruminants (au moins 3 avortements sur une période de 7 jours) est obligatoire au vétérinaire sanitaire de l’élevage avec une prise en charge de la visite et des prélèvements par l’Etat. Elle est hélas négligée notamment car la France est désormais indemne de brucellose. Or certains agents infectieux abortifs sont contagieux et à fort potentiel de propagation à l’intérieur et à l’extérieur d’un cheptel infecté, voire à risque pour les humains, particulièrement les femmes enceintes.

De nombreux agents abortifs mis en cause

Or divers facteurs peuvent intervenir dans l’arrêt d’une gestation (traumatisme, alimentaire, maladies). Depuis 2010, un groupe national d’experts travaille pour donner un guide d’intervention dans le cas de séries d’avortements. Il est désormais valorisé au sein d’OSCAR (Observatoire et Suivi des Causes d’Avortements chez les Ruminants), dispositif national recueillant les résultats de diagnostic différentiel des avortements issus de protocoles optimisés et standardisés.
Ainsi, au fil des ans, dans les 10 départements pilotes engagés, l’importance de 2 « triades » d’agents infectieux majoritairement en cause a été démontrée : chez les bovins, BVD, fièvre Q et néosporose ; et pour les petits ruminants chlamydiose, fièvre Q et toxoplasmose.

Vers une harmonisation des pratiques en Nouvelle-Aquitaine

Une démarche régionale est en cours au sein de la FRGDS Nouvelle-Aquitaine, afin de redonner un nouveau souffle aux déclarations d’avortements, d’augmenter le taux d’élucidation pour inciter les éleveurs à entamer les recherches nécessaires dans leur troupeau, et de pouvoir en tirer des enseignements collectifs sur les pathologies en cause.
En pratique, dans le cas de séries d’avortements, il s’agit d’adopter un tronc commun basé sur les résultats du protocole national OSCAR en y ajoutant deux maladies jugées d’importance supposée en Nouvelle Aquitaine : l’Ehrlichiose pour les bovins et la Salmonellose chez les petits ruminants, avec bien sûr la possibilité pour le vétérinaire d’ajouter ou enlever certaines recherches suivant le cas et la situation épidémiologique des cheptels.

Le Mot des Laboratoires d’Analyses

Il existe une grande variété de causes infectieuses d’avortement, leur mode d’action est tout aussi varié, et leur dépistage aussi !.
Soit on met en évidence l’agent pathogène grâce à différentes techniques, soit on recherche les anticorps produits par les animaux contre cet agent pathogène (sérologie). Associer les 2 techniques permet de maximiser les chances d’élucider la cause.

Exemple de Neospora chez les vaches et de Toxoplasma chez les petits ruminants :
Ces 2 parasites assez voisins s’installent chez les ruminants et se transmettent in utero à leurs produits, ils se localisent alors souvent sur le bloc « cerveau/yeux ». Récupérer l’avorton afin que le laboratoire teste le cerveau est le seul geste assurant la certitude d’un résultat positif. Par contre, l’écouvillon des voies génitales de la mère est très peu probablement révélateur.
Par ailleurs, comme il s’agit d’une maladie parasitaire, si la contamination a eu lieu sur le troupeau, d’autres femelles sont vraisemblablement infectées. Elles produisent alors des anticorps qu’on peut trouver grâce à un sondage sur quelques animaux (5 en général), en particulier sur des anciennes avortées ou « coulées » depuis plus de 3 semaines, temps minimum nécessaire à la production d’anticorps.
Faire une prise de sang et un écouvillon (si avortement de moins de 8 jours) sur l’avortée sont obligatoires (brucellose !) mais ne permet pas de dépister la néosporose ou la toxoplasmose, l’avorton et/ou des prises de sang sur d’autres femelles du lot sont nécessaires.

Exemple de la Fièvre Q : au moment de l’avortement causé par la Fièvre Q, la bactérie responsable, Coxiella est présente dans les sécrétions génitales (ATTENTION A SE PROTEGER, ZOONOSE !), le placenta voire l’avorton, mais en quantité variable selon l’espèce : en abondance chez les petits ruminants, beaucoup moins chez la vache. On ne parvient pas toujours à la mettre en évidence par la technique PCR. D’un autre côté, un résultat positif isolé en PCR peut ne pas être significatif de la cause d’avortement. Comme c’est une maladie contagieuse, là encore, des prises de sang sur les congénères permettent d’évaluer si la maladie est présente dans le troupeau.